Novembre

Mercredi 3 novembre, 1h08 du matin
De retour à Lyon depuis hier après-midi, je m’accor­de seulement à cette heure tardive un petit droit à la plume depuis mon dodo.
Le passage à Paris et au château s’est bien déroulé.
Pour Paris : à l’aller et au retour pause chez Shue pour l’aider dans sa thèse. Au retour, tournée des mater-pater pour mon anniversaire.
Au château : récupération des premiers exemplaires de ma dernière réédition : L’enseigne à Lyon ; enregistrement des premiers entretiens avec Heïm pour que puisse sortir le premier CD de ce que l’on espère une longue série.
Aurais-je joué les salopards ? Toujours est-il que Sandre m’a appris au téléphone, durant mon séjour à Au, que Jean-Philippe, pas le jardinier du château mais le directeur du R. lyonnais, ne voulait plus me revoir. Fini l’amitié, la rupture « bête et brutale » comme la chanterait Brel, pour avoir eu l’affront d’aider la chère Florence P. chez elle un dimanche après-midi.
Je lui ai envoyé un courrier non de justifications, mais de compréhension du mal fait, c’est ma très grande faute ! et souhaitant qu’il ne tienne Florence P. pour aucunement responsable de cette si terrible trahison. Pas la moindre réaction de sa part depuis mon « pour le reste, tu es le seul juge », conclusion de cette missive. Il semble que la condamnation silencieuse ait été adoptée...

Lundi 8 novembre, 0h30 environ
Ma vie lyonnaise s’épice après la persistance du bougre Jean-Philippe à me laisser en quarantaine, malgré mon geste de repentir. Pourquoi donc devrais-je endurer tous les chagrins ? ! Je le conchie voilà tout. Je ne vais pas en plus m’obliger à ne plus revoir amicalement Florence P., quitte à contredire ma lettre que le déchu s’est empressé de lire à Sandre. Je vais donc aussi jouer la transparence avec ceux qui m’importent.
Cela n’empêchera sans doute pas mon exclusion d’être intensifiée, mais la bataille est lancée. A la Jeanne d’Arc j’étriperai l’inflexible, le roide susceptible.

Mardi 9 novembre, 0h10 environ
Une pratique de plus en plus fréquente pour la tenue de ce Journal : prendre la plume à la journée naissante, après avoir enlevé mes lentilles. Voir ma plume Sheaffer glisser sur le papier au plus près motive peut-être la poursuite de la rédaction.
Déjà dix ans que le mur de Berlin a été mis à bas. Gorbatchev, de très intelligente façon, rappelle que cet événement prétendu n’est qu’un épiphénomène à valeur de symbole qui n’aurait jamais eu lieu sans le préalable, fondamental selon lui, de la perestroïka. Certes, l’ancien dirigeant soviétique défend son clocher et son grand œuvre (entrepreneur de démolitions en quelque sorte), mais cela n’entache pas la justesse de ses propos qui désacralisent un chouïa la portée abusive des symboles...

Demain je reçois mon nouvel ordinateur et la suite des Enseigne à Lyon. L’ouvrage a été présenté hier soir, trop rapidement à mon goût, sur TLM. Je doute de l’impact. Le Progrès doit sortir très vite l’article de Garin-Michaud.

Vendredi 12 novembre
Envoi d’une carte artisanale à Shue pour son anniversaire de demain.
Jeudi, très agréable moment passé au magnifique Café des négociants avec Florence P., toujours aussi adorable, et son amie Estelle. Moi si disert lorsque je ne me sens pas impliqué par la relation, qu’elle soit cordiale ou charnelle, je m’angoisse d’un vide dans la conversation lorsque je suis sous le charme.
Tant pis pour le gars Jean-Philippe qui n’a pas su me faire confiance et dont la rancune lui sert de justification. Qu’au moins ce véritable procès d’intention soit fondé sur une réalité, même si celle-ci n’est qu’a posteriori. Mon sens du sacrifice ne va pas jusqu'à endosser la sentence d’un crime que je n’ai pas commis. En l’espèce le délit potentiel serait un délice.
Fanfan mité était plutôt d’un genre austère ; avec Jacques Chirac, la détente des zygomatiques s’amorce. Très sympathique pour beaucoup, il détone un chouïa en Président.
Ce soir, à Marseille, les médias nous apprennent qu’il a... mangé une bouillabaisse : deuxième titre après le nouveau tremblement de terre en Turquie. Mieux que d’inaugurer les chrysanthèmes... pour les quelques milliers de morts que l’on peut encore déplorer pour le pays victime.
Demain soir, je passe la soirée avec Flo, et un tennis est prévu pour le dimanche matin... en espérant un réveil pas trop tardif.
A trente ans, je me sens plus décalé que jamais dans mon inarrimage social. Mes activités multiples mais peu rémunératrices ne répondent à aucun plan de carrière, et moins encore à une sécurisation de ma situation. Autonomie, indépendance en sont la contrepartie positive. La chance de maîtriser de bout en bout une petite structure éditoriale qui me confère le fabuleux statut d’éditeur, n’est pas le moindre des privilèges.
La carrière m’emmerde, l’ambition me fait bâiller, l’étalage friqué m’indiffère... Je reste un peu poète en rage, prêt à sauter au cou du connard pour l’achever. Exit les foireux !

Samedi 20 novembre, 0h30
Les dates défilent... Le moral n’est pas des meilleurs. Sans doute la conjonction de divers facteurs...
En revanche, je me plais totalement dans mon nid, refuge à ma dimension de célibataire, très fonctionnel, très bien situé...
Puisque le rancunier Jean-Philippe m’a exclu de toutes les prochaines sorties, voyages et autres pérégrinations, je vais rebondir vers de plus passionnantes sphères.
Mon 31 décembre avec Laurence, de l’institut Galien, et ses amis dans une maison de campagne...
Premiers pas sur internet via Wanadoo. De bonnes choses, mais je fulmine souvent contre les aberrations de certains systèmes, la lenteur de chargement et mes incompréhensions informatiques.
Le cinquième grand cahier de notes devrait sans souci s’achever avant la fin de l’année (j’entame la dernière page). Les VI et VII sont constitués de la correspondance avec Sandre R. alias ma Sandre (92, puis 96-98). Je commencerai donc le huitième gros cahier. Le volume commence à se faire sentir... mais l’intérêt ?
Le thème du clonage, que j’étudie avec mes pharmacies, est un bon révélateur des hypocrisies de certains pays et au premier chef des Etats-Unis : rigueur publique affichée, laissez-faire privé effectif...

Vendredi 26 novembre
Je terminerai ce cinquième cahier de mon Journal, enfin ! depuis avril 95 qu’il est ouvert, en évoquant Michel Polac reçu cette nuit par PPDA dans Vol de nuit.
Sort en janvier prochain des extraits de son Journal qu’il tient depuis 1944 (un total de vingt mille pages environ). Le vieux monsieur sort aussi La Luxure sur sa vie sexuelle.
Toujours aussi brillant et revigorant. Cela me rappelle son Droit de réponse auquel j’étais très fidèle.
Certainement une des dernières fois qu’on le verra sur le petit écran. Triste temps qui défile...

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